Regardons les cadavres~ {Canine}

Quelques jours s’étaient écoulés depuis la nuit qu’elle avait passée en compagnie de Canine. Heureusement, son emploi du temps avait été assez chargé pour l’empêcher de ressasser les souvenirs et de se morfondre sur ses actes. Certes, elle avait eu le temps de se remettre en question, mais surtout dans le but de ne plus éprouver de remord. Elle ne pouvait nier avoir ressentit du plaisir et elle commençait d’ailleurs à l’accepter. Il y avait encore tu travail à faire, mais c’était déjà une avancée certaine par rapport à son état d’esprit d’avant. Elle aurait aimé pouvoir se tester à nouveau, mais elle était bien trop fatiguée par ses journées de travail pour appeler son serviteur et aller écumer les rues avec lui. Les conseillers de son père avaient décidé de l’éradiquer don conseil d’administration de la ville, jugeant qu’elle n’était pas apte à assumer la place de son père. Une jeune femme, presque adolescente encore, n’avait rien à faire là, empêchant leurs magouilles et leurs tentatives de corruption. Dans une ville dominée par le mal et la peur, il est mal vu d’être juste ...

Alice avait donc décidé de résoudre un des problèmes majeurs de la ville pour leur prouver à tous qu’elle était capable de travailler comme les autres. Elle avait décidé de s’attaquer aux Fantômes qui rodaient la nuit et commettaient des meurtres en écrasant les gens sur le sol, ne laissant en général que la tête intacte. D’ailleurs ces derniers temps, le taux de meurtres avait augmenté tel point que cela en devenait sérieusement préoccupant. Elle avait cherché une solution partout mais n’avait strictement rien trouvé, ce qui l’agaçait. Un soir, alors qu’elle était encore cloitrée dans la bibliothèque, elle se demanda si Théodore pouvait l’aider. Après tout, il avait vécu sûrement beaucoup plus longtemps qu’elle, mais aussi dans des endroits différents. Il avait peut-être déjà rencontré ce genre de créatures et connaissait leurs habitudes. Alice ne voulait pas se faire de faux espoirs, mais elle espérait quand même que le vampire allait pouvoir faire quelque chose pour elle.

C’est ainsi que par un après-midi grisâtre, elle se trouvait entourée des trois autres membres du conseil dans la salle de la morgue. Pour une fois, ils avaient réussit à ramasser un cadavre. Le médecin souleva le drap. Les compagnons de la rousse grimacèrent, écœurés, tandis qu’elle souriait bizarrement. Ce corps était parfait, l’exemple même des attaques que subissait la ville. C’était une jeune fille. Sa tête et son cou étaient intacts, puis son corps n’était plus qu’une bouillie de chair, d’os, de sang. Alice se rapprocha et observa de plus près. La victime était étalée sur une grande planche de bois, d’où le fait qu’ils avaient réussit à la transporter. On pouvait voir que le reste de son corps était encastré dans le bois, prouvant la force de son agresseur. Alice ne savait pas quoi penser. Elle allait vraiment avoir besoin de son vampire préféré ...

Elle ressortit, toujours suivie par les trois conseillers. Tandis qu’ils parlaient, Alice appela Canine. Elle espérait qu’il puisse venir malgré que ce soit en plein après-midi. Elle ne pouvait pas faire autrement. Déjà que beaucoup jugeait son comportement bizarre ces derniers temps, elle ne ferait que renforcer cette impression si elle se faisait prendre en pleine nuit devant un cadavre, en compagnie d’un inconnu à l’aspect des plus douteux. Elle avait entendu des rumeurs. Une de ses servantes avait même émis l’hypothèse que la jeune noble avait fait un pacte avec le Diable et que c’était lui qu’ils avaient vu dans sa chambre, ces deux pupilles d’un rouge intense ... Cela faisait sourire Alice. Ils n’étaient pas loin de la vérité ...

La jeune femme était tranquillement en train de parler avec les trois autres. Pour une fois, pas d’engueulades, pas de pressions, ils arrivaient à échanger leurs points de vu. Et ceux des conseillers n’étaient pas si inintéressants que ça, il y avait du progrès. C’est alors qu’on objet tomba à leur pied et qu’un nuage de fumée en sortit, masquant la vue. Alice ne bougea pas, se doutant que c’était un coup du vampire. Elle croisa les bras et attendit que le brouillard se dissipe. Elle aperçut les trois hommes par terre et ressentit une pointe d’agacement. Il n’était pas obligé de faire ça ... Ne pouvait-il pas faire comme tout le monde ? Arriver, dire bonjour, faire un grand sourire bien hypocrite ? Mais non, c’était trop demandé au vampire. Elle soupira, regardant la silhouette encapuchonnée. Qu’est ce qu’il pouvait être agaçant quand même. Mais elle était d’une humeur pas trop mauvaise, elle allait donc laisser glisser, seulement peut-être faire quelques remarques à propos du manque de civilités dont il faisait preuve.

« On dit bonjour quand on est poli. Suivez-moi. »

Elle se détourna et rentra dans le bâtiment. Les trois conseillers seraient bien retrouvés de toute façon, elle ne s’inquiétait pas plus que ça. Mais quand même, elle espérait qu’il ne leurs avait pas fait trop de mal, elle en avait besoin. Surtout qu’ils commençaient enfin à comprendre que de la gêner n’était pas le meilleur moyen de progresser.

« Nous ne sommes pas tous seuls alors essayez de vous tenir un peu s’il vous plaît. »

Elle le mena à travers le hall puis ils descendirent les escaliers qui menaient aux salles d’autopsie, plus précisément à celle où elle se trouvait quelques minutes plus tôt. Elle rentra dans la pièce, où se trouvait toujours le légiste et un de ses assistants. Sans leur prêter attention, Alice souleva le drap, révélant le cadavre.

« Tout frais de cette nuit ... J’espérais que peut-être vous auriez une idée de qui ou quoi aurait fait ça. Enfin, une idée précise j’entends. Certains disent que ceux sont des fantômes, d’autres des humains. Ou autre chose une autre ... Créature. Nous n’avons strictement aucune piste ... Mais avec vos voyages, peut-être avez déjà rencontré un cas semblable ... »

Elle se frotta les yeux, fatiguée et lassée. Vivement qu’elle ait une bonne nuit de sommeil, complète. Elle se rapprocha du vampire et lui murmura, de façon que seul lui entende :

« Si je vous ais appeler en pleine journée, c’est que je n’avais pas le choix. Alors arrêtez de me mépriser et essayons de travailler ensemble. »

Certes, il n’avait aucune raison de l’aider, si ce n’est pour lui faire plaisir. Mais il était venu en ville avec un objectif, même si elle ne savait pas lequel, et peut-être que cela l’aiderait lui aussi. Enfin, elle avait espoir qu’il ne l’envoie pas paître. Ca l’énerverait profondément. Le médecin légiste observait Canine d’un air bizarre. Il attendit qu’Alice se détourne pour retourner près du cadavre pour lui attraper le bras et lui demander qui c’était. Elle dégagea son bras et lui lança un regard venimeux.

« En quoi cela vous regarde ? Ce jeune homme est ici pour donner son avis ... D’expert. Maintenant allez faire votre rapport avec votre larbin. »

Les deux autres partirent, jetant toujours des regards méfiants à Théodore. Bon, ils avaient sûrement raison, disons qu’il n’était pas le genre de personne qu’on croisait tous les jours. Mais au moins, en révélant sa présence ainsi, ils n’auraient plus besoin de faire attention pour se voir. Et cela lui évitera de passer par la fenêtre à chaque fois qu’il veut la voir ...

{désolée pour la qualité ...}

Alice écouta avec attention les propos du chasseur. Après tout, il s’y connaissait beaucoup mieux qu’elle et il ne semblait pas du genre à fabuler. Mais s’il était véritablement impossible de les tuer ... oh non, pas des immortels. Il y avait déjà assez de choses qui parcouraient la ville et qui étaient dures à éradiquer, il ne fallait pas rajouter des Fantômes increvables. Lorsqu’il lui donna l’ordre implicite de partir, elle ouvrit la bouche dans le but de protester et de lui rappeler qu’il n’avait aucun ordre à lui donner, mais elle s’en abstint. Peut-être valait-il mieux qu’il travaille tout seul, tranquillement. La rousse se détourna et sortit de la salle. Il fallait qu’elle apprenne un peu à lui faire confiance ... Elle remonta dans le hall où un larbin l’accosta, lui parlant de l’état des trois conseillers. Elle feignit de ne rien savoir, disant qu’elle était rentrée avant. Intérieurement, elle pestait. Il allait lui causer des problèmes avec ses méthodes de brute, ne s’en rendit-il donc pas compte ? Allait-il le réaliser seulement quand toute la ville sera à ses trousses, espérant pouvoir tuer ce monstre ? Il faut croire que oui, sinon il agirait avec plus de discrétion. Certes, c’est elle qui l’avait appelé en pleine journée, mais ce n’était pas une raison ! D’ailleurs, comme cela se faisait-il qu’il arrivait à supporter les rayons du soleil à présent ? Elle allait devoir lui poser la question.

Mais en attendant, elle avait un après-midi à tuer. Elle hésita à retourner à la Mairie, mais la rousse n’était pas tranquille de laisser Théodore tout seul. Dieux seul sait ce qu’il était capable de faire. Elle préférait rester dans les parages. Elle alla donc s’installer dans le bureau du médecin légiste et lut les différents rapports qui se trouvaient à porter de main. Rien qui ne l’avançait. Au bout d’une cinquantaine de minutes, elle en avait déjà assez et balançait la liasse de feuilles sur le bureau. Que de paperasse, pour peu d’informations concrètes ... Elle tapa du poing sur le bureau avec rage. Ils s’enlisaient complètement ! Certains n’acceptaient même pas la présence des Fantômes, disant que ce n’était que fabulations. Or ils étaient là, ils existaient et ils empêchaient la jeune fille de faire ce qu’elle voulait. Il fallait absolument que Canine trouve quelque chose de plus intéressant, comme comment les tuer quelque chose. Elle voulait du progrès, la stagnation n’avait jamais servit à grand-chose. Une migraine commençait à lui saisir les tempes. Alice posa sa tête sur ses bras et ferma les yeux, espérant faire passer son mal de crâne rapidement. Au lieu de cela, elle s’assoupit.

La jeune femme fut réveillée en sursaut par un employé de la morgue, qui lui disait que c’était inacceptable que son expert soit encore là à cette heure et qu’il allait le faire dégager. La rousse fronça les sourcils. Pauvre fou, s’il pensait pouvoir faire partir la créature avec seulement des paroles. Elle se redressa, bailla, secoua sa tignasse puis se dirigea vers la salle d’autopsie, espérant arriver à temps pour empêcher le médecin d’énerver son serviteur et d’en subir les fâcheuse conséquences. Elle préférait parer toute éventualité. Elle débarqua dans la pièce et regarda les trois personnes qui s’y trouvaient. Elle se tourna vers le médecin, essayant de ne pas s’énerver :

« Ecoutez-moi bien. Cet homme est venu là parce que je l’ai demandé, donc il restera aussi longtemps qu’il voudra et que je l’y autoriserais. Pour qui vous prenez-vous ? Mais ... »

Avant qu’elle n’ait le temps de finir sa phrase, un hurlement retentit à l’étage supérieur. Alice resta la bouche ouverte, sans rien dire, se demandant ce que cela pouvait bien être. Canine réagit plus vite qu’elle et après avoir dégainé ses armes et lui avoir glissé quelques paroles à l’oreille, il s’en alla vers la source du cri. La rousse se retourna et fronça les sourcils. Qu’est ce que ça pouvait bien être ? Elle suivit ses traces et croisa deux personnes, qui semblaient complètement terrorisées. Elle monta doucement les marches et s’arrêta sur le palier. La peur l’empêchait d’aller plus loin.

« Théodore ? »

{C'est un peu nul, je le conçois. Si quelque chose te plaît pas, hésites pas à le dire~}

Comment avaient-ils fait pour rentrer ? Alice observait en silence le cadavre de l’employée qui se trouvait non loin d’elle. Elle avait été imprudente de rester en ces lieux alors que la nuit était tombée. Elle aurait dû retourner à la Mairie ... Mais en même temps, s’ils avaient pénétré dans la morgue, ils auraient très bien pu le faire là-bas ... En fait, la sécurité n’existait plus dans cette ville et c’était quand même assez inquiétant de penser qu’elle pouvait à tout moment se faire attaquer et mourir. Elle espérait qu’ils allaient trouver une solution à ce problème avant que cela n’arrive. Elle se sentit emportée et se retrouva rapidement dans la salle d’autopsie. La vitesse de Canine l’étonnait toujours autant et elle rageait de ne pas avoir encore eu le temps de s’entraîner. Car elle allait encore être un boulet plus qu’autre chose. Elle le regarda tracer la ligne de gros sel, se demandant ce qu’il faisait. Puis elle se souvint de ce qu’il avait dit quelques instants plus tôt. Elle était assez dubitative quant au fait que cela allait les arrêter, mais ils n’avaient pas vraiment d’autre choix. Qui ne tente rien n’a rien ... Le chasseur repartit après une dernière recommandation, la laissant seule avec le médecin légiste. Celui-ci commença à la presser de questions et à lui faire part de sa méfiance quant à Théodore, mais elle ne prit même pas la peine d’écouter. Elle essayait surtout de trouver un moyen de s’en sortir. Quelques minutes s’écoulèrent, les seuls bruits venaient de l’étage, où le vampire devait être aux prises avec les spectres. Alors qu’elle ne s’y attendait pas, l’homme se leva et courut dehors, comprenant qu’il ne trouverait aucun soutien en la personne d’Alice.

« Non ! »

La rousse se précipita à sa suite, mais le mal était fait. Le médecin avait marché sur la ligne de gros sel, la rompant. Il s’arrêta un instant dans le couloir, ne sachant où aller. Ce fut fatal pour lui. Rapidement, un Fantôme arriva et commença à le compresser. Alice détourna la tête. Elle savait que cela allait être son tour après. Elle appela Canine, mais elle pensait qu’il n’allait pas arriver avant un moment. Elle observa autour d’elle, cherchant désespérément un moyen, une issue, quelque chose ! Dans un gargouillis, le médecin mourut. Le Fantôme s’éleva de nouveau dans les airs et la fixa. A ce moment là, au grand soulagement de la jeune fille, le chasseur apparu. Mais son soulagement fut de courte durée, car à peine était-il arrivé que le Fantôme se précipita sur lui, tentant de l’écraser aussi. La rousse resta figée, ne sachant que faire. Voir son serviteur se faire tuer sous ses yeux était assez horrible. Heureusement, il avait plus d’atouts et de réflexes qu’elle, il réussit à se libérer. Elle le suivit, docile. Ce n’était pas le moment de faire la gamine capricieuse qui ne supporte pas de ne pas avoir son mot à dire. Elle saisit du poignard. C’était bien gentil de le lui donner, mais elle savait qu’elle allait avoir franchement du mal à s’en servir. Elle n’était pas vraiment douée. Il but son sang et repartit. Tout cela allait un peu trop vite pour son pauvre petit cerveau d’humaine. Devait-elle le suivre ? Elle jugea préférable d’attendre que ce soit lui qui vienne, histoire d’éviter de le gêner s’il était en train de faire quoi que ce soit. Bien vite, le silence revint.

Ce moment de répit permit à la jeune fille de souffler et de faire le point. Mais cela ne servit strictement à rien : elle ne savait toujours pas quoi faire, ni comment ils allaient se débarrasser de ces Fantômes, ni comment faire pour rentrer chez elle, ni qui allait pouvoir l’aider. D’ailleurs, les spectres avaient dû décider que c’était elle leur proie aujourd’hui car plusieurs Fantômes arrivèrent en même temps, glissant silencieusement au dessus du sol. Alice serra le poignard entre ses doigts, bien décidée à ne pas se laisser faire. Le premier recula lorsqu’elle agita son arme d’un air menaçant, mais un autre traversa le plafond et lui tomba dessus, l’écrasant contre le sol. Le poignard glissa sur le carrelage et fut rapidement hors de portée. Alice, sentit la pression sur tout son corps augmenter progressivement. Son poignet droit craqua et une douleur vive la saisit. Elle ne savait pas s’il était cassé ou quoi que ce soit, mais en tout cas il était inutilisable. Elle tenta de combattre la douleur et tendit son autre main vers la lame dans un espoir désespéré. Un hurlement de rage se fit entendre et la pression qui la maintenait au sol cessa. Elle se redressa tant bien que mal. Devant elle, un Fantôme venait d’apparaître, à la tignasse rousse bien reconnaissable. Alice se demanda pourquoi les autres spectres n’osaient plus avancer mais si cela lui permettait de survivre, tant mieux.

« Va retrouver ton serviteur et en allez vous en le plus rapidement possible. Enfermez-vous dans la Mairie, vous y serez en sécurité. Dépêches toi, je ne pourrais les retenir que quelques instants. »

La jeune fille ne se le fit pas dire deux fois et elle courut rejoindre Canine. Elle le vit par terre et jura entre ses dents. Elle se rapprocha de lui et s’accroupit à côté de lui.

« Théodore, je vais vous demander un dernier effort. Il faut absolument que vous nous rameniez à la Mairie. Buvez tout le sang dont vous avez besoin, n’hésitez pas, mais il est vital de faire vite. »

Encore fallait-il espérer qu’il l’entende et qu’il soit capable d’atteindre de la mordre ...

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{Désolée pour la qualité, j'ai pas réussi à faire mieux~}

Les larmes de rage et de frustration coulaient lentement sur ses joues. Ca n’allait quand même pas finir ainsi ... Si ? Là, sur le sol, comme deux larves incapables de se mouvoir. La rousse ne savait plus quoi faire. La fatigue et la panique lui embrouillaient l’esprit. Mais même en pleine possession de ces moyens, elle n’aurait pas trouvé quoi faire. Car ils ne pouvaient strictement rein faire, juste espérer qu’une aide inattendue arrive. Elle resta là, à fixer d’un regard vide le corps étendu sur le sol de son serviteur. Puis un cri la tira de sa torpeur. La jeune bourgeoise releva la tête, cherchant l’origine de ce cri. Encore une victime des Fantômes ? Non, c’était deux enfants qui se précipitèrent vers eux. Alice fronça les sourcils, se demandant qui pouvaient être ces gosses. Surtout qu’ils semblaient connaître Canine. L’un d’entre eux était un Fantôme et traversa le corps. La rousse se releva, restant muette pour une fois. Le garçon tenta de soulever mais n’ parvint pas. Alice se réveilla enfin et l’aida.

Ce ne fut pas une tâche facile de ramener Théodore jusqu’à la Mairie. Ses deux porteurs le laissèrent choir sur le lit d’Alice. Celle-ci se lassa tomber dans un fauteuil. La douleur de son poignet avait été ravivée par le transport du corps. Elle regarda sans réagir le garçon s’ouvrir le poignet. Quand elle entendit la voix de Théodore, elle se releva et vint s’asseoir à ses côtés. Elle ne pouvait s’empêcher d’être inquiète pour lui. On pourrait aisément se demander pourquoi, vu qu’elle n’avait pas vraiment l’air de le porter dans son cœur. Mais à vrai dire, la jeune femme ne pouvait s’empêcher d’être un peu impressionnée par lui du fait qu’il lui tenait tête, chose qui était rare. Elle avait l’habitude qu’on lui obéisse sans rechigner, même si c’était pour mieux comploter dans son dos. Le vampire était un des seuls êtres sur cette planète qui avait été franc avec elle et rien que par ça, il avait gagné son respect, mais aussi sa sympathie. Alice s’était attachée à lui, chose qu’elle n’aurait jamais dû faire. Mais les sentiments ne se contrôlent pas ...

« Comment allez-vous ? Que s’est-il passé pour que vous soyez dans cet état ? »

Elle avait perdu toute attitude hautaine, laissant transparaitre pour une fois son côté humain. Elle jeta un coup d’œil au corps du gosse étendu sur le sol. Il faudrait aussi penser à le soigner celui-là ... Mais en plus, la nouvelle de l’affrontement à la morgue allait sûrement bientôt se répandre ... Ils n’avaient que peu de temps pour trouver un moyen d’expliquer comment ils y avaient réchappé, alors qu’ils étaient au même endroit que les autres et que d’apparence, ils n’avaient aucune excuse pour y avoir réchappé. Sans laisser le temps au vampire de répondre, elle se leva et sortit dans le couloir appeler un serviteur. Elle préférait que quelqu’un s’occupe tout de suite du garçon, plutôt que de le laisser inconscient sur le sol. Ce fut un de ses plus vieux larbins qui monta, un de ceux qui savent tous les secrets d’une famille mais qui ne les révèlent jamais. Il prit le corps de l’enfant et l’emmena dans une autre chambre, pour le soigner. Au passage, il jeta un regard qui mit mal à l’aise Alice. Ses yeux exprimaient la méfiance mais aussi la crainte, comme lorsqu’on voit quelque chose qui ne devrait pas exister. La rousse secoua la tête. Elle devait se faire des idées. Elle avait vraiment besoin de sommeil. Mais avant d’aller dans les bras de Morphée, elle voulait savoir. Elle retourna s’asseoir au côté de son serviteur, se contentant de le fixer.

{Ahah. C'est minable.}

Il semblait être ... Ailleurs. Elle n’osa pas insister de peur de le déranger dans ses réflexions, mais elle voulait savoir qu’est ce qui avait bien pu le mettre dans cet état. Les yeux de la rousse papillonnèrent et alors qu’elle tentait de se tenir éveillée, la fatigue était bien trop forte pour son petit corps frêle et peu habitué à vivre ce genre d’aventure. Elle commença à tomber sur le lit, trouvant d’un coup le matelas bien moelleux. Canine se releva et la rousse se contenta de lever les yeux vers lui. C’était bien la première fois qu’il lui demandait s’il pouvait se nourrir ... Elle le laissa lui enlever ses dernières forces. Elle fixait les pupilles rubis du chasseur et sans savoir pourquoi, un fin sourire étira ses lèvres. Le genre de sourire rassurant qu’elle n’avait pas l’habitude de faire. Puis lorsqu’il la lâcha, elle se roula en boule dans son lit, s’endormant instantanément.

Ce fut Susan qui la réveilla quelques minutes plus tard, lorsqu’elle débarqua dans la chambre. La jeune bourgeoise se redressa en grommelant et jeta un coup d’œil à sa chambre. Mais elle ne vit strictement rien, à part le dos de la jeune Fantôme qui sortait. Où pouvait être Canine ? Elle ne savait pas combien de temps s’était écoulé, tout était encore confus. Elle se leva avec difficulté et alla chercher un long ruban qu’elle utilisa pour immobiliser son poignet et éviter qu’il ne lui fasse trop mal. Elle pensait aussi qu’il faudrait qu’elle s’occupe de ses blessures. Elle se demandait aussi si quelqu’un s’était occupé de Lucas ou si son vieux serviteur l’avait juste posé sur un lit. Elle était assise sur le fauteuil, tentant tant bien que mal de réfléchir, chose complètement impossible vu son état. Et elle détestait ça. Elle entendait des bruits de combat venant de dehors, mais elle n’avait pas la motivation pour s’en mêler. Elle se sentait lasse de tout ça. Ce soir, à la morgue, elle avait compris qu’elle ne servait pas à grand-chose et qu’elle avait toujours besoin de quelqu’un pour l’aider, que ce soit Canine ou bien sa défunte mère. Même un Fantôme avait plus de pouvoir qu’elle ... Il allait falloir qu’elle y remédie.

Elle était entre l’éveil et le sommeil lorsque Susan débarqua pour la seconde fois dans sa chambre. La rousse tenta de comprendre ce qu’elle disait. Lui, pire que les Maudits ? Que voulait-elle dire par là ? Alice était déjà au courant que la créature n’était pas exemple parfait de courtoisie et de sensibilité, mais il était quand même loin d’être un monstre comme les Maudits ... Quoiqu’elle se fût déjà posé la question à plusieurs reprises et avait eu un peu de mal à trouver une réponse satisfaisante. Mais ce qui mit la jeune femme mal à l’aise, ce fut la larme qui coula le long de la joue de la petite fille. Alice l’appela pour tenter de lui demander plus d’explication, mais elle était déjà partie. La rousse laissa sa tête retombée en arrière, fermant les yeux. Qu’est ce qu’il avait encore fait ...